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Comment procéder à la vente d'un fonds de commerce : le guide complet

28/05/2024
Jérôme Benaïnous

Décider de vendre son fond de commerce est une étape décisive dans le parcours entrepreneurial. Que ce soit pour des raisons de retraite, de changement d'orientation ou toute autre motivation personnelle, cette opération doit être menée avec la plus grande rigueur. En effet, la cession d'un fonds de commerce implique de respecter un cadre juridique strict afin de préserver les intérêts de toutes les parties prenantes.

Ce guide exhaustif vous accompagnera à chaque étape de ce processus complexe, de la préparation jusqu'à la finalisation de la transaction. Vous y trouverez toutes les informations nécessaires pour mener à bien votre projet de cession de fond de commerce dans les meilleures conditions.

Comprendre la notion de fonds de commerce

Avant d'entamer les démarches de vente, il est essentiel de bien cerner la notion de fonds de commerce. Selon le droit commercial, un fonds de commerce désigne l'ensemble des éléments corporels (mobilier, matériel, outillage) et incorporels (clientèle, enseigne, droit au bail) permettant l'exploitation d'une activité commerciale.

Ce regroupement d'actifs constitue une unité économique valorisable et cessible. Lors d'une vendre son fond de commerce, l'acquéreur se voit transmettre la propriété de cette entité, lui permettant de poursuivre l'activité existante ou d'en développer une nouvelle.

Les éléments composant un fonds de commerce

Pour bien appréhender l'objet de la cession, il convient d'identifier précisément les éléments constitutifs du fonds de commerce. Ceux-ci se répartissent en deux catégories :

Éléments corporels

Cette catégorie regroupe les biens matériels nécessaires à l'exploitation de l'activité, tels que :

  • Le mobilier (tables, chaises, étagères, etc.)
  • Le matériel (machines, ordinateurs, véhicules, etc.)
  • L'outillage (outils de production, équipements spécifiques, etc.)
  • Les agencements et installations (rayonnages, vitrines, enseignes, etc.)
  • Les aménagements immobiliers (cloisons, faux plafonds, revêtements, etc.)

Éléments incorporels

Il s'agit des actifs intangibles mais essentiels au bon fonctionnement de l'entreprise, notamment :

  • La clientèle attachée au fonds
  • Les éléments de propriété intellectuelle (marque, logo, brevets, licences, etc.)
  • Le droit au bail commercial
  • Les contrats de travail, d'assurance et d'édition en cours
  • Les autorisations administratives liées à l'activité

Il est à noter que certains éléments ne sont pas systématiquement inclus dans la cession, comme les stocks de marchandises, les créances et dettes de l'entreprise, ou encore les documents comptables. Leur transfert éventuel doit faire l'objet d'un accord spécifique entre les parties.

Qui peut procéder à la vente d'un fonds de commerce ?

Pour être en mesure de vendre son fond de commerce, le cédant doit remplir trois conditions cumulatives :

  1. Avoir la qualité de commerçant, c'est-à-dire exercer des actes de commerce de manière habituelle.
  2. Disposer de la capacité juridique requise, à l'exclusion des mineurs et des majeurs sous tutelle ou curatelle.
  3. Exprimer un consentement libre et éclairé, non vicié par l'erreur, le dol ou la violence.

De plus, si le fonds de commerce est soumis au droit de préemption de la commune, le cédant devra l'en informer préalablement afin qu'elle puisse exercer ou non son droit prioritaire d'acquisition.

Évaluer la valeur du fonds de commerce

Une fois la décision de vente arrêtée, l'étape cruciale consiste à déterminer la juste valeur du fonds de commerce. Cette estimation conditionne en grande partie le succès de l'opération et la satisfaction des parties prenantes.

Deux méthodes d'évaluation sont couramment utilisées :

Méthode par le bénéfice

Cette approche consiste à prendre en compte la moyenne des bénéfices réalisés au cours des trois dernières années, auxquels sont réintégrés les éléments déductibles sur le plan comptable. Le résultat obtenu est ensuite multiplié par un coefficient variant généralement entre 3 et 5, en fonction du secteur d'activité et de la situation du marché.

Méthode par comparaison

L'alternative consiste à se baser sur les prix pratiqués pour des fonds de commerce équivalents, situés dans la même zone géographique. Cette méthode permet de s'aligner sur les réalités du marché local.

Pour une estimation plus fiable, il est recommandé de combiner ces deux approches. Toutefois, l'exercice reste délicat et fait souvent appel à l'expertise d'un professionnel qualifié.

Une fois la valeur estimée, le cédant dispose d'un élément clé pour entamer les négociations avec les acquéreurs potentiels.

Préparer la cession : obligations préalables

Avant de conclure la vente, le cédant doit s'acquitter de deux obligations d'information essentielles :

Informer les salariés

Dans les entreprises de moins de 250 salariés, le cédant est tenu d'informer l'ensemble de ses employés de son intention de vendre son fond de commerce. Cette notification doit intervenir au plus tard deux mois avant la date prévue de cession.

Les salariés disposent alors d'un délai pour éventuellement se porter acquéreurs du fonds. Durant cette période, ils sont soumis à une obligation de confidentialité, sous peine de sanctions disciplinaires.

Informer la commune

Si le fonds de commerce est situé dans un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat, la commune bénéficie d'un droit de préemption. Le cédant doit donc lui adresser une déclaration préalable mentionnant le prix et les conditions envisagés pour la cession.

La municipalité dispose ensuite d'un délai de deux mois pour faire connaître sa volonté de se porter ou non acquéreur du fonds. En cas d'exercice du droit de préemption, les parties devront s'accorder sur un prix de vente, à défaut de quoi l'affaire pourra être portée devant le juge de l'expropriation.

Rédiger la promesse de cession

Dans la pratique, la vente d'un fonds de commerce est souvent précédée de la signature d'une promesse. Cet acte formalise l'accord préalable des parties sur les conditions essentielles de la transaction, notamment le prix de vente.

Deux types de promesses peuvent être envisagés :

Promesse unilatérale

Il s'agit d'un engagement pris par une seule partie, soit le cédant (promesse unilatérale de vente), soit l'acquéreur (promesse unilatérale d'achat). L'autre partie dispose alors d'une option d'achat ou de vente qu'elle peut lever pendant un délai déterminé.

Cette promesse doit comporter plusieurs mentions obligatoires, comme le délai d'option, le montant de l'indemnité d'immobilisation et une clause de dédit permettant au promettant de se rétracter moyennant le versement d'une somme.

Promesse synallagmatique

Également appelée compromis de vente, cette promesse engage les deux parties de manière réciproque : l'une promet de vendre, l'autre promet d'acheter. Elle doit alors reprendre l'ensemble des mentions obligatoires prévues pour l'acte de cession définitif.

L'exécution du contrat est suspendue jusqu'à la réalisation d'une condition suspensive, comme l'obtention d'un prêt par l'acquéreur. Si cette condition n'est pas remplie, le contrat devient caduc.

Quelle que soit la forme choisie, la promesse de cession doit être enregistrée auprès de l'administration fiscale dans un délai de 10 jours suivant son acceptation, sous peine de nullité.

Rédiger l'acte de cession

L'acte de cession constitue le document juridique officialisant la vente du fonds de commerce. Il doit impérativement comporter certaines mentions obligatoires, sous peine de nullité de la vente à la demande de l'acquéreur.

Mentions relatives à l'origine du fonds

  • Le prix de cession
  • Le nom du précédent propriétaire
  • La date et le prix d'acquisition par le cédant
  • La ventilation du prix entre les éléments incorporels, le matériel et les marchandises

Mentions relatives aux inscriptions grevant le fonds

  • L'état des privilèges et nantissements grevant le fonds, ou une mention attestant de leur absence

Mentions relatives à l'activité du fonds

  • Le chiffre d'affaires et le résultat d'exploitation des trois derniers exercices
  • Le chiffre d'affaires mensuel entre la clôture du dernier exercice et le mois précédant la cession

Mentions relatives au bail commercial

  • La date et la durée du bail
  • Le nom et l'adresse du bailleur
  • Le nom et l'adresse du cédant, ainsi que de ses prédécesseurs en cas de cessions antérieures

Attention : Depuis juillet 2019, ces mentions obligatoires ont été supprimées par la loi. Toutefois, il est recommandé de continuer à les inclure dans l'acte afin de sécuriser la transaction et de protéger les intérêts des parties.

Accomplir les formalités post-cession

Une fois l'acte de cession signé, il convient d'accomplir plusieurs formalités dans les délais impartis :

Enregistrement aux impôts

Dans le mois suivant la signature, l'acquéreur doit faire enregistrer l'acte auprès du service des impôts des entreprises dont il dépend. Cet enregistrement déclenche le paiement des droits d'enregistrement, calculés en fonction du prix de vente selon un barème progressif (0% jusqu'à 23 000 €, 3% entre 23 001 et 200 000 €, 5% au-delà).

Déclaration au Guichet Unique

Depuis janvier 2023, l'acquéreur doit immatriculer son entreprise via le Guichet Unique, la nouvelle plateforme unique pour les formalités d'entreprise.

Publicité légale

Dans les 15 jours suivant la signature, l'acte de cession doit être publié dans un Journal d'Annonces Légales (JAL), puis au Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales (BODACC) dans les 3 jours suivants. Cette publication, comportant des mentions spécifiques, vise à informer les tiers, notamment les créanciers du cédant.

Le respect de ces formalités est essentiel pour assurer l'opposabilité de la cession aux tiers.

Connaître les conséquences fiscales

Au-delà des frais d'enregistrement, la cession de fond de commerce entraîne d'autres implications fiscales qu'il convient d'anticiper :

Imposition des bénéfices

Le cédant doit s'acquitter immédiatement de l'impôt (IR ou IS selon son régime) sur les bénéfices réalisés depuis la clôture du dernier exercice comptable.

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

Une déclaration de TVA doit être effectuée dans les 30 jours suivant la publication au JAL. Toutefois, l'opération peut être exonérée de TVA si le fonds est cédé dans son intégralité et que l'acquéreur est assujetti.

Imposition de la plus-value

En cas de prix de vente supérieur au prix d'acquisition, la plus-value réalisée par le cédant est imposable. Le régime d'imposition (IR ou IS) et le taux applicable varient selon la durée de détention du fonds et le statut juridique de l'entreprise.

Des cas d'exonération totale ou partielle de l'impôt sur la plus-value sont prévus, notamment pour les très petites entreprises ou en cas de départ à la retraite du cédant.

Respecter les obligations des parties

Tant le cédant que l'acquéreur sont soumis à certaines obligations lors de la vendre son fond de commerce :

Obligations du cédant

  • Fournir à l'acquéreur toutes les informations nécessaires sur l'origine du fonds, son activité et sa situation juridique
  • Délivrer le fonds de commerce tel que décrit dans l'acte, sans vice caché
  • Garantir la jouissance paisible du fonds à l'acquéreur

Obligations de l'acquéreur

  • Payer le prix de vente convenu
  • Respecter les engagements pris dans l'acte de cession (reprise de contrats, de salariés, etc.)
  • Accomplir les formalités d'enregistrement et de publicité dans les délais impartis

En cas de manquement à ces obligations, chacune des parties peut engager la responsabilité de l'autre et réclamer des dommages et intérêts.

L'importance de recourir à un expert

La vendre son fond de commerce est une opération complexe, comportant de nombreux enjeux juridiques, fiscaux et financiers. C'est pourquoi il est vivement recommandé de solliciter l'assistance d'un professionnel qualifié, tel qu'un avocat ou un expert-comptable.

Les avantages de faire appel à un expert

  • Une expertise approfondie du cadre légal et réglementaire encadrant la cession de fonds de commerce
  • Une évaluation précise de la valeur du fonds, prenant en compte tous les aspects techniques et financiers
  • Un accompagnement personnalisé à chaque étape du processus, de la préparation à la finalisation de la transaction
  • Une sécurisation juridique et fiscale de l'opération, minimisant les risques de litiges ultérieurs
  • Un gain de temps et d'efficacité grâce à une gestion optimale des formalités administratives

Choisir le bon professionnel

Pour bénéficier d'un accompagnement de qualité, il est essentiel de sélectionner un expert reconnu pour son expertise dans le domaine de la cession d'entreprise. Voici quelques critères à prendre en compte :

  • L'expérience et les références du professionnel dans le traitement de dossiers similaires
  • Sa connaissance approfondie de votre secteur d'activité et de votre région
  • La clarté et la transparence de ses honoraires
  • La qualité de son suivi et de sa communication tout au long du processus

N'hésitez pas à solliciter plusieurs devis et à comparer les offres avant de faire votre choix. Un bon expert saura vous guider efficacement dans cette étape cruciale pour la pér ennité de votre entreprise.

Anticiper la transition pour l'acquéreur

Au-delà des aspects juridiques et financiers, la vendre son fond de commerce implique également une dimension humaine non négligeable. Pour assurer une transition harmonieuse, il est judicieux d'anticiper certains éléments avec l'acquéreur.

Faciliter la reprise d'activité

Afin de permettre à l'acquéreur de reprendre l'exploitation du fonds dans les meilleures conditions, le cédant peut envisager plusieurs actions :

  • Organiser une période de tuilage pendant laquelle il restera présent pour transmettre son savoir-faire et ses bonnes pratiques
  • Préparer une documentation exhaustive sur les process opérationnels, les fournisseurs, les partenaires clés, etc.
  • Présenter l'acquéreur aux salariés et parties prenantes essentielles (clients, bailleurs, administrations, etc.)

Assurer la continuité pour les salariés

La cession d'un fonds de commerce entraîne automatiquement le transfert des contrats de travail vers l'acquéreur, sauf opposition expresse des salariés. Pour favoriser leur adhésion au changement, il est recommandé de les informer suffisamment en amont et de les rassurer sur le maintien de leurs conditions d'emploi.

Gérer la communication

Afin d'éviter toute rumeur ou incompréhension, il est judicieux de préparer une communication claire et transparente autour de l'opération de cession. Celle-ci peut être adressée aux clients, fournisseurs, partenaires et autres parties prenantes, en insistant sur les aspects positifs du changement de propriétaire.

En abordant ces différents aspects avec soin, le cédant facilite une transition en douceur pour l'acquéreur et préserve la pérennité de l'activité commerciale.

Conclure la cession avec sérénité

La vendre son fond de commerce représente une étape charnière dans le parcours entrepreneurial. En suivant scrupuleusement le cadre juridique et réglementaire, en anticipant les implications fiscales et en préparant minutieusement la transition, il est possible de mener à bien cette opération avec succès.

Grâce à une approche rigoureuse et à l'accompagnement d'experts qualifiés, le cédant peut envisager cette nouvelle étape avec confiance et sérénité. Une fois toutes les formalités accomplies, il pourra se consacrer sereinement à de nouveaux projets professionnels ou personnels, fort de la pérennité assurée pour son ancien fonds de commerce.

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Jérôme Benaïnous
Cabinet AFEX
Jérôme Bénaïnous est expert-comptable et commissaire aux comptes diplômé de Paris Dauphine. Il a reçu le Prix du meilleur mémoire d’Expert-comptable d’Île-de-France. Il a exercé en tant que directeur de mission chez Ernst & Young, un des plus importants cabinets d’audit financier et de conseil, avant de s’installer.
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